nono le hools = littérature punk rock + poésie punk rock
samedi 4 mars 2006

Mayflower

"A well regulated militia being necessary to the security of a free State,
the right of the People to keep and bear arms shall not be infringed."
(Constitution of the United States of America, Amendment II)


I the People,
Je crois qu'il est temps. Au mois de mai cela fera un an que j'écris ici, bien trop qu'Elle m'a assassiné, et un peu plus que mon nom a quitté la Pologne. Derrière la fenêtre la nuit tombe. Je pourrais encore t'en chier des lignes et des lignes en brut de cette putain d'envie de crever qui ne me lache pas, mais tu t'en lasserais et tu aurais raison - je t'entends déjà gueuler (Remboursé !). Je pourrais te dire pour me justifier que tu n'as qu'à passer chez moi, en n'oubliant pas la vodka, pour que tu voies : on ne s'y habitue pas à la littérature qui ne s'écrit pas. Mais j'ai assez tenu mes positions, il faut maintenant l'attaque, ou du moins l'agression. Je crois qu'il est temps, de passer de la littérature d'urgence à la littérature administrative, la rédaction d'un visa. Je crois qu'il est temps, de partir là-bas.
Au mois de mai je prendrai les chemins que j'ai tracés ici jusqu'à maintenant, les voies que j'ai décidées navigables malgré les avis de tempêtes et les monstres marins - je suis un des leurs. Je prendrai la mer comme on prend une femme, avec le désespoir joyeux. Je prendrai les armes pour là où c'est un droit, où alors le crime est moins étroit. Là-bas, mes pages blanches comme un drapeau noir.
Au mois de mai, je crois qu'il est temps. Je balancerai un point final dans la gueule de ce journal, le brouillon d'une existence. Ce coup-ci pour de vrai, j'embarquerai dans la galère. Il faudra bien sûr encore jouer de la lame dans cette traversée, calmer les bassesses des autres migrants (les mêmes que la mienne) ; mais dorénavant mon sang ne coulera pas seul. Et puis la faim, et puis la maladie, qu'importent : ce sera long, très long, mais cette fois avec une destination.
Aujourd'hui je mets mes papiers en ordre pour l'autorisation de monter à bord. Je les jetterai une fois arrivé, là-bas le passé reste tout à écrire, la vie comme un roman. Et ce sera la carrière d'un malfrat, d'un gangster sans gang, d'un roi de plus dans la nouvelle république. Je me lancerai dans les affaires, un peu troubles certes, mais là-bas telle est la loi. Au mois de mai j'ouvre le mémento de mes forfaits à venir : la Fabrique du Meurtre - un nouveau site, avec un nouveau blog et bientôt dans les faits divers des journaux. J'ai pris de l'avance : j'ai troqué mon vieux Times New Roman 12 pour un .38 spécial de fabrication française flambant neuf - Ain't got no time anymore, but a gun. J'ai désormais la syntaxe made by Manurhin, l'assassinat en French Touch. Et déjà d'impatience des cadavres fleurissent ici. Il est plus que temps de partir.
Au mois de mai. Pour le moment je ne suis encore pas très loin de toi, alors je passerai quelques fois t'embrasser, pour faire durer les adieux. Et qui sait ? Peut-être que là-bas je t'y retrouverai. Ce qui est certain, c'est que je m'y retrouverai.

*
*    *

Stanisław Wróbel suit des yeux les bateaux hollandais en partance sur l'océan, un bout d'espoir au coeur des larmes. Aujourd'hui il attend encore sur le quai de pierre, mais bientôt il sera un autre siècle, un nouveau monde. Dans quelques semaines il embarque pour là-bas, il quitte cette terre où il a trop marché sans savoir pourquoi. Là-bas où il aura enfin un être, là-bas où quelque chose pourra naître. Il repense à cette fille au regard bleu qui l'a tant aimé et puis plus rien, un grand vide alors ; il partira, traversera du possible la mort. Il oublie déjà les rues slaves de sa ville triste, ça fait si longtemps. Un amour qui s'en est allé et une patrie qui n'existe plus, toujours la même vieille rengaine sans un au revoir. Il n'échappe pas à l'Histoire : 1899, une fin comme un commencement. Au-dessus des vagues, il y a le vent.
samedi 25 février 2006

Junk Mail


Ecrire une nouvelle phrase
Se taper une autre ligne
Et reposer la lame sur le miroir.


vendredi 24 février 2006

Mais Je n'Ose


Une journée de plus, une journée de moins
Quelque part entre le regret et l'espoir
Entre deux déceptions
Je n'oublie pas
Ma nA


vendredi 17 février 2006

Décoration Intérieure

"En somme, l'Enfer est ce que vous en faites."
(Charles Bukowski)

(Toi qui me lis peut-être,)

Valentine's day. Alors. La cravate bien mise et les doigts ceints de monstres d'argent je t'écris maintenant ; une dizaine d'albums de ce bon vieux Chet Baker en random sur le Winamp. C'est qu'il n'est pas rien le rendez-vous avec toi. Je me dois d'empaqueter joliment la merde : la condition humaine - et tu m'en sais gré, bien sûr. Il est une autre histoire quand tes yeux traînent ailleurs, je traîne avec eux.

Cette histoire.
J'avais tenté une fois de plus de te la raconter, de me la raconter surtout : de sauver ma peau par la frime de la littérature. J'en avais écrit des feuillets, des versions sans cesse recommencées. Des qui te disaient quand il ne reste plus que le crépuscule, chaque heure un soir. Un temps hors du temps. Des qui voulaient te dire ce qui ne se dit, le pourquoi dès lors je ne crie pas. Des qui voulaient te dire l'immense silence, radical. La désertion du sens. Des qui t'auraient dit le cadavre sur la moquette, un bleu qui tire au noir. Un cadavre animé pourtant mais de Dieu sait quoi, de Dieu qui n'existe pas. Des qui te demandaient "Tu regardes quoi ?" Le balancement et le souffle, c'est déjà une activité humaine. Des qui t'auraient dit avec des mots fanés comme les couleurs de ton dernier coup d'oeil. Quand je ne te paye pas de quelques bobards, je ne vis pas. Des qui voulaient te dire l'existence des choses qui n'existent pas.
Quelque chose à te donner à voir, à en faire tout un monde.

Seulement voilà. Seulement.
Un grand trou.

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*   *


[J'ai abandonné le clavier en début d'après-midi, pour manger un bout, épuisé surtout de ces derniers temps, de l'alcool et des cachetons en décoration, je me suis endormi. Je me suis réveillé à près de 19 heures, j'ai avalé deux vodkas tièdes et ai tracé rejoindre les copains au studio de répétition - faudra que je lâche la bibine avant les sessions d'enregistrement de ce week-end, ça me flingue la voix. C'est en gueulant dans un micro que j'ai achevé cette Saint Valentin, d'une balle dans la tête. I'm in love with Rock'n'Roll woah. On est déjà le lendemain et deux ou trois jours de plus.]

*
*   *


Not a Valentine's day. Alors. J'avais tenté de te raconter tout ça, mais les mots étaient si loin qu'il n'y avait plus rien à pouvoir dire. La vérité se confondait maintenant avec la réalité, la fiction à la rue - ou dtc. J'avais perdu le sens de l'humour, celui là même qui fait de mon charme (paraît-il, mais après tout : tu me lis peut-être). Ne demeurait que le seul instant, sans après ni avant, trop tard pourtant : l'abominable de l'âme, la biologie. C'est dans le corps qu'il a fallu écrire, à la fiente brûlante des tripes, trancher dans le vif du sujet sans s'encombrer de la syntaxe. Aller chercher le verbe où il a fui, en me foutant dans la merde jusqu'au cou et au-delà. Il a fallu la littérature d'urgence ; 911 is a joke et c'est déjà un début de comédie. Le possible d'en faire un de ces cinémas, la bonne blague. Le préalable in extremis.

C'est pourquoi tu n'as rien lu
Cet endroit où j'ai écrit
Il est quand tu ne vois pas

Et comment aurais-tu pu
Si moi non plus je n'y suis
Quand tu ne regardes pas

Il me faut de tes yeux pour pleurer. Et tant qu'il y aura des larmes ça ira tant mal que bien : ça fera de l'encre, du sang contenu. Même si ça troue encore un peu la peau.

Contenir, se tenir ; ne pas éclater, réussir l'image. Mille morceaux en un unique, négocier le naufrage. Il n'est pas de rédemption, qu'une autorisation à la représentation - car la vie se rate, immanquablement. Il est de rester dans ton champ de vision. Alors quand je ne vis plus j'essaie de mourir : je me donne à voir, je te donne à voir. A toi je m'abandonne, car je te préfère au néant, et tant pis si tu ne vaux guère mieux. Je me déchire en m'accrochant - sur le fil du rasoir : la langue.
Toi et moi, on maintient l'équilibre ; il suffirait de pas grand chose pour se casser la gueule et la queue dans le rien. Tu crèves de la même merde que moi, mais tu vis de ce que j'en crève, alors j'en vis aussi. Ce n'est qu'une plaisanterie, un jeu de mots - et de regards. Un arrangement.
De ce peu de foi j'en fais une profession : architecte d'intérieur en Enfer. Je suis un célèbre écrivain américain. Et une obligation : celle à vivre les choses de sorte à ce qu'elles puissent être racontées - l'obligation à les tourner. Se faire tout un film, un drame alors. Un souvenir de quelque chose qui n'aura pas été, pour après la mort. Voilà pourquoi j'avais tenté de te dire tout ça, l'histoire de ces semaines passées ; pour que le beau nous fasse oublier la peur. Cette foutue trouille, la sale odeur qui nous colle au cul, pour la baiser - en faire un faux témoignage, d'un mensonge la civilisation. Oublier la peur, la raison du temps à écouler, briser les miroirs et choisir le reflet dans ton regard ; me permettre dès lors de te dire comme si c'était vrai, à toi qui me lis peut-être, je t'aime.


Douche Froide

"Tu rêvais de belles déprimes
A noyer dans des nuits sans fin
Comme dans les vieux polars français
Du début des années 80"

[PARIS VIOLENCE, "Douche Froide"]
mercredi 15 février 2006

Décadence de Salon

Il semblerait qu'il soit une heure de la nuit, au coeur de quelques jours si lointains. Sans doute il y a des MP3 en random sur le Winamp, une fenêtre du personal computer vers un ailleurs. Des bouteilles vidées et cassées sur le sol, un corps déchiré debout sur la table basse. Il a le torse nu et en sang, les yeux derrière d'étranges lunettes noires. Il hurle un salut nazi, avec le bras tendu, ou en fuite, loin, très loin, le plus loin possible : partir d'ici. Se détacher. Abandonner la viande. Il reste encore tant et tant à payer, mais ce n'est qu'en vain. Le compte est soldé depuis longtemps : Jésus Christ s'est flingué, à moins que ce ne soit Kurt Cobain. Il ne sert plus à rien de vivre ni de mourir, plus aucun sens ni même de direction. Il danse sans chanson au milieu du salon en location, il est le fantôme de l'Occident en putréfaction. Il est une fin de la civilisation, il est la biologie. Il est un moment de février 2006.
lundi 13 février 2006

De quelque part par terre

(Toi qui me lis peut-être,)

C'était la semaine dernière.

J'avais mis en stand by la nouvelle que je rédigeais ces temps, pour te raconter le week-end passé, où l'on s'est croisés et sans doute pas. Pour te raconter qu'au coeur de ce nouvel hiver, l'électricité du bruit et des spotlights ça tient chaud quand même - les yeux surtout. Pour te raconter l'ange irlandais d'un bar de nuit, comment elle a transformé cette heure trop tard (toujours la même) en du plus joli que mon imagination. Pour te raconter enfin, qu'on se quitte en se marrant comme de vieux copains, les aventures de Rock et de Roll qui sont dans un bateau ivres, bourrés, torchés, et que ce n'est pas dans l'eau que quiconque est tombé. Je voulais te raconter de mon plus beau. Mais c'était un week-end, passé.
C'était un entracte.
Les mots ont été appelés à se faire voir ailleurs, en urgence. La nostalgie et le doux souvenir pouvaient bien attendre ; le mal lui est impatient. J'ai couru, aussi vite que j'ai pu, un feuillet, et puis deux. Trois. Quatre. Autant de fois que je suis tombé, je me suis relevé. En vain : tu n'as rien lu ici. Alors je ne sais toujours pas.

J'ai vidé mon compte en banque, et puis les marques sur mon corps.

Plusieurs jours que je n'ai pas ouvert les volets, je porte chez moi des lunettes noires comme si ça allait faire un bout de soleil. Ca ressemble à une chanson que j'aurais pu écrire, et d'ailleurs je l'ai écrite. Ca ressemble, mais ce n'est pas ça.

Je ne me rappelle pas de tous mais les amis sont passés, les autres et puis les unes. Un peu comme on vient veiller un mort. Mais c'était pire. Pire que la mort ; ça n'en finit pas. Ca ressemble, mais ce n'est pas ça.

Alors.

Dans les décombres je t'écris aujourd'hui. A toi, qui me lis peut-être. C'est encore une lettre d'amour : vendredi avec mes magnifiques j'entre en studio, enregistrer une poignée de Gibson et de Marshall à t'offrir. La bande son d'une vie, quelque part.

C'était une dernière semaine.
Quelques années déjà dans le troisième millénaire.

mardi 31 janvier 2006

Rendez-vous

De l'alcool blanc et un cigare, Chet Baker et une e-page à remplir : let's have a lunch, me, I and myself. J'ai été traîner un bout de matinée dans Little Odessa, des fois que j'y aurais trouvé une raison. Je n'en ai même pas ramené le besoin d'achever ma dernière chanson, que quelques hérédités de grain distillé. Je pars demain pour la France avec deux cravates, une poignée d'euros et des mots pas finis - sans doute une gueule de bois pour emballer le tout. Un beau paquet que je m'en irai étaler sur la scène de samedi, bien au milieu des lumières. Il y aura les vieux amis et des nouveaux, Angelic Upstarts et des habitudes à reprendre. Je hurlerai quarante-cinq minutes durant la mort et les déchirures, tout le rien que je tente d'étouffer le reste du temps, tant bien que mal ; je gagnerai par l'obscénité le droit de me défoncer la tronche for free. En chien savant, je vivrai un peu et par les mêmes yeux qui m'assassinent. Je voudrais avoir le trac, je n'ai qu'un vieux goût d'ailleurs et de merde qui me colle à la langue.
Samedi, ça fait une échéance, comme un objectif : une justification. N'allons pas chercher plus loin, il sera toujours le moment de tomber. Déjà ce jour, je sens la vodka monter partout dans ce corps débile, je pressens la poésie et puis l'oubli - il n'est que presque midi. La bouche s'endort, plus que peu de mots alors : ça oubliera que ça ne veut qu'un baiser, même si, comme pour un baiser, ça ira gerber après. Ca ira gerber samedi, bien au milieu des lumières. And this is just another punk song, and this is just a love song. En attendant, dans un tombeau en location à quelques miles de Prospect Park, je baise l'ivresse bien entamée. J'espère te revoir bientôt, peut-être là-bas, même si tu es une autre - je sais que tu sauras m'offrir la seule chose dont j'ai besoin : le mensonge. Alors viens, et mens-moi ; que je ne meure plus, ne serait-ce qu'un temps. Je t'en prie, samedi, n'importe qui, regarde-moi.

nono le hool's
(Varsovie 1972 - New York 2005, RIP)

lundi 30 janvier 2006

"And I swear that I don't have a gun"


Les poubelles de la cour dégueulent des ordures du week-end.

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Mon obligation à la littérature n'est seulement que par la peur. Panique, la terreur.

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Il est souvent des fois où tu ne me vois pas, et c'est tant mieux : j'en fais de même.

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Demain tu applaudiras ton silence d'aujourd'hui, tu me paieras pour le crime.

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Je sais déjà que ton amour est dégueulasse.

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Depuis de long mois (plus d'une année) j'entends la journée durant les machines et les coups contre le mur, la destruction des appartements de l'immeuble d'à côté. On rénove l'habitation. Vendredi matin en revenant de chez le coiffeur, je suis passé par la ruelle de ces travaux.

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Le balancement du corps et l'âme comme déchirée, combien de temps le sang dans mes veines ?

jeudi 26 janvier 2006

20h19 et des poussières

La Bête rôde mais je n'ai trouvé que tes mots : de l'amour oublié sur la première page d'un Tanizaki, de l'amour de ta main avec ton prénom à la fin. Quelque chose qui dispense de la lecture du roman qui s'en suit.

(La Bête rôde et les mots s'enfuient.)